La couleur, voilà la passion de Caroline. Elle l’utilise, l’enseigne, la vit.
D’où lui vient cette passion? De l’enfance? Pas sûr; certes, elle dessinait beaucoup, mais pas plus que d’autres enfants. De l’adolescence alors? Peut-être, elle se souvient de ce plaisir à voir fuser les couleurs éclatantes des encres Sennelier qu’elle utilisait pour créer des foulards en soie qu’elle vendait ensuite pour se faire un peu d’argent de poche. En tout cas, la fascination pour la couleur s’est développée dans le cours de ses études de peinture à La Cambre prenant progressivement une grande part dans ses recherches personnelles. Mais elle se souvient surtout d’un choc visuel lors de la visite d’une usine d’un ami de son père. Là, face à des pigments présentés dans d’énormes fûts, elle a été littéralement subjuguée. Elle ressent encore l’intensité de ce bleu d’outremer, de ce violet de manganèse. Ce souvenir est toujours vibrant d’émerveillement dans sa mémoire . Quand elle souhaite retrouver ce caractère unique de beauté pour l’exploiter dans ces tableaux, Caroline fabrique alors sa peinture elle-même; elle mélange des pigments de Cadmium de qualité exceptionnelle reçus du directeur de cette usine avec une charge et un liant, selon ses propres recettes.
Formatrice
Aujourd’hui, à côté de son travail d’artiste peintre, Caroline enseigne la couleur. Difficile de faire comprendre qu’il s’agit d’un sujet complexe, pointu, et même très abstrait. C’est comme si la couleur était réservée à l’enfance. On la manipule depuis qu’on est petit, on l’utilisait même avant le langage! Elle reste accessible à tous, on se l’approprie spontanément, selon notre intuition, du coup, on la croit « facile », on est persuadé de bien la connaître. Dans les études artistiques, des cours de couleur ont longtemps fait défaut et Caroline elle-même n’en a pas bénéficié pendant son cursus à la Cambre.
Les harmonies de couleurs se déclinent aussi dans la garde-robe de Caroline
Et pourtant, s’ils ne se fient qu’à leurs connaissances empiriques, amateurs comme professionnels ont tendance à rester dans ce qu’ils connaissent, à limiter leurs possibilités. Caroline est toujours étonnée de voir le peu de connaissance et d’audace qu’ont les uns et les autres par rapport au mélange des couleurs, et leur tendance à acheter des peintures « prêtes à l’emploi », sans exploiter les nuances infinies qu’offrent les mélanges des huit couleurs de base qu’elle recommande dans ses formations.
Peintre
Dans son travail personnel, Caroline oscille entre activité de création très libre puis de réflexion sur le travail effectué. Elle décrit ce processus comme suit: “ au fond, j’aime me laisser aller dans les zones indécises de la création, là où une tache en amène une autre, là où la couleur m’invite à l’expression. C’est peut-être dans ce lâcher-prise qu’adviennent les moments de grâce qui portent au ressourcement, au dépassement, à la magie de l’acte créatif. »
Détails de tableaux de Caroline
La magie de la couleur
Pour Caroline, la couleur est un domaine magique et fascinant dont on ne fera jamais le tour, avec cette impression qu’une partie nous échappe car on la perçoit différemment selon notre culture, notre caractère, notre histoire, notre ressenti. Aujourd’hui elle me fait part de sa lecture récente de Georges Roque « Quand la lumière devient couleur » dans lequel elle a été sensibilisée à toutes les nuances de blanc de Bonnard auxquelles l’auteur consacre tout un chapitre. À ce propos, je vous invite à lire les défis #9 et #10 sur le blanc, pour vous laisser inspirer par des artistes qui en ont exploité toutes les facettes.
En tant que formatrice elle a l’impression d’ouvrir à ses élèves aussi bien la porte du merveilleux que celle de la réflexion; elle est fière de voir leur évolution et les nouvelles pistes qu’ils prennent après avoir suivi ses cours.
Des oursins, un jardin, des feuilles comme source d’inspiration pour Caroline et ses élèves (en bas à gauche, détail d’un de ses tableaux).
La nature est source d’inspiration pour Caroline, inspiration qu’elle souhaite communiquer à ses élèves en leur proposant des « études rétiniennes », un travail d’après nature, dans son jardin ou dans l’atelier, au départ de fossiles, coquillages ou feuillage.
A la recherche d’un équilibre
Le temps partagé entre l’artiste et la formatrice est sujet à tension. Souvent Caroline souhaiterait plus de temps pour créer mais ses activités d’enseignante, de conseil en couleur et d’exploration grignotent le temps. Elle apprécie le côté social, les rencontres et surtout les possibilités d’échanges que lui offrent ces dernières activités par opposition au travail solitaire du peintre et du milieu artistique relativement fermé. Mais c’est décidé: elle va retourner à ses pinceaux!
Le site de Caroline : https://www.carolinedujardin.net/